dimanche, avril 17, 2016

Gourmont en Ymages



(Portrait de Remy de Gourmont par Raoul Dufy)


 

    Dimanche 3 avril au musée des Beaux-Arts de Saint-Lô, trente personnes avaient répondu à l'invitation des AMM pour découvrir les illustrateurs anciens et modernes de Remy de Gourmont. 




    L'amorce ? le tableau du musée provenant du fonds Feuillet "La Mort de Sapho" de Gustave Moreau, peintre qu'appréciait Gourmont. 

Flore Singer, amie de Valérie Feuillet, commentait  ainsi  cette oeuvre dans une lettre: 

"On ne saurait s'imprégner de cette composition-là sans devenir poète à son tour, aussi ai-je pensé tout de suite en le regardant que Moreau vous offrait une valeur marchande de plus de six-mille francs.N'oubliez pas de me dire l'impression de M. Feuillet,je serais bien étonnée qu'il ne fût pas sous le charme".







    Christian Buat,  a présenté avec force images, verve et humour, les illustrateurs de cet écrivain, bas-normand par ses origines et ses études, mais au rayonnement international. 


Oubliée, la grisaille de ce dimanche 3 avril - jour de la Saint-Sixtine - oubliée, la couverture « jaune pipi » ( dixit notre conférencier) des premières éditions au Mercure de France : les coloris des couvertures suivantes, des illustrations et des frontispices, avec leur cortège de sonorités exotiques nous ont fait rêver : « vignette en deux tons, jaune souci et vert d'écosse », « japon vert d'enfer », « couverture papier peint », « draperie jaune semée de lions rouges », « Rose verte », « Rose pivoine », « du jaune au zinzolin, du rose à l'orange ».
 Enumérations dignes d'un poème en prose façon Paul Fort ,  litanies, théorie des couleurs et des affinités électives élaborée par Gourmont; faux anathème lancé sur le violet, qualifié « d'instable et d'hypocrite ». 
Mais le noir profond des bois gravés de Willette, le clair-obscur réalisé par Pierre -Eugène Vibert, la ligne vibrante de Raoul Dufy rayonnent autant que la couleur.






    La lecture d'extraits d'oeuvres et de lettres faite par Jean Duval a rendu sensibles la personnalité et l'art de cet auteur revu par des artistes contemporains: Annick Bouillon, Bernard Carbonnel ...




    L'auteur coréen de mangas, Kim Dong Hwa,  a même noté sur un dessin de feuille morte quelques vers du célèbre poème champêtre "Simone" !

"Simone, aimes -tu le bruit des pas sur les feuilles mortes?

Quand le pied les écrase, elles pleurent comme des âmes, 
Elles font un bruit d'ailes ou de robes de femmes.

"Simone, aimes -tu le bruit des pas sur les feuilles mortes?

Viens:nous serons un jour de pauvres feuilles mortes.
Viens:déjà la nuit tombe et le vent nous emporte.

"Simone, aimes -tu le bruit des pas sur les feuilles mortes?





     Saviez-vous que le premier à encourager les débuts du Douanier Rousseau fut Remy de Gourmont ? Et qu'il lui commanda,  une lithographie , publiée dans l'Ymagier "Les Horreurs de la guerre", plus tard devenue tableau ?

    Le peintre et sa peinture inspirèrent à Gourmont ces réflexions sur LA GLOIRE:  

 « Naïf, l'homme l'était moins que je ne l'avais cru et sa peinture devait trouver de francs admirateurs .Voilà une  leçon pour ceux qui font profession de mépriser tout ce qui est nouveau et tout ce qui leur semble baroque. Et cela prouve aussi que la gloire est une loterie, qu'on ne sait rien, qu'il faut croire tout, qu'il faut douter de tout (Le puits de vérité, Albert Messein 1922)

A retenir lors de la visite de l'exposition  au musée d'Orsay, Le Douanier Rousseau, l'innocence archaïque .






















     Aujourd'hui peu lue, si ce n'est par ses Amateurs,l'oeuvre de Remy de Gourmont a connu en son temps des éditions rares aussi bien que populaires. 
Ce fut un plaisir de la découvrir, grâce au talent et à la complicité de nos invités : érudition, vivacité, humour, chez Christian Buat, naturel très étudié de la voix et de ses inflexions chez Jean Duval.

M. S .
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Christian Buat est vice-président du Cercle des amateurs de Remy de Gourmont, auteur de
Qui suis-je ? Gourmont, paru aux éditions Pardès, maître entoileur du site http://www.remydegourmont.org/
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Lien ici  (O.F.)
et
 (Les Amateurs de Remy de Gourmont)

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mardi, avril 12, 2016

Question d'échelle

Intégrer des personnages dans des photos: 
simple question d'échelle,
ou 
marque d'humanisme ?


Telle fut la réflexion suscitée par notre visite de  Guyancourt (Saint-Quentin en Yvelines ) Lien ici 

Amusons -nous à inverser le rapport avec les trois photos ci-dessous, qui mettent en scène Lucie, photographiant une des sculptures de Denis Mondineu  dans la rue Lenôtre.







Le  but du sculpteur, Denis Mondineu  était d'humaniser cette rue passante  où chacun vaque à ses occupations, en installant un intérieur à l'extérieur:

-Divan où un lecteur est plongé dans ses pensées




-Commode, avec miroir, fleurs et tiroir débordant d'objets



-Jeune fille se mirant



-Etagère croulant sous




les livres,  les bibelots et un crâne .

"J'aime bien le bric-à -brac" précise l'artiste, "c'est dans ma nature"


Explications
ci-dessous:



"Les personnages sont de taille double, à l'échelle de l'espace public auquel Denis Mondineu destine le plus souvent ses oeuvres"
Au-delà de la surprise amusée s'installe un relatif sentiment d'inquiétante étrangeté.
Qui est ici chez soi? Si les "géants "de la rue sont dans leur appartement, les humains qui passent sont-ils voyeurs, invités ou intrus ?
Le passage est-il vraiment transformé  en "lieu convivial et chaleureux "?

-"Les passants respectent-ils ces oeuvres d'art ? "demande Lucie.

Force est de constater que des graffiti ont abîmé le divan moelleux, qu'à une sculpture représentant un chien   manque l' appendice caudal...

La terre cuite, matériau de prédilection de l'artiste,  porte des traces verdâtres d'humidité et l'étagère au sympathique fouillis risque de s'écrouler.

Et si les touristes s'arrêtent, photographient et commentent, les passants affairés, eux,  continuent de passer et de s'affairer.
D'un pas moins vif?


Dans un coin de leur tête, peut-être revivent-ils  les contes de l'enfance,
le  temps où leurs  parents étaient de puissants rois,  de majestueuses  reines, où les petits triomphaient d'ogres et de géants?
Qui sait ?





jeudi, avril 07, 2016

Ca coule de source (2)

Poursuivons notre promenade, de Guyancourt aux sources de la Bièvre,
 en une autre compagnie  cette fois - avant de retrouver Cergie,  dans le billet suivant .

La rivière  Bièvre tire son nom d'un mot gaulois, brebos , signifiant castor, qui donna en Anglais beaver.
Sans aller si loin, on se souvient que le patronyme Beauvoir (même étymologie) porté par l'auteur du deuxième sexe, était à l'origine du surnom que Jean-Paul Sartre donnait à Simone: le castor, en raison de sa ténacité face au travail intellectuel.
Après cette parenthèse littéraire, revenons, non pas à nos moutons,  mais  à notre vallée .

Donc "la rivière, jadis peuplée de castors, prend sa source au hameau de Bouviers, à Guyancourt, traverse la vallée sur 15 km avant de bifurquer vers le nord. Canalisée et enterrée à partir d'Antony, c'est le seul affluent de la Seine à Paris. "
(Source: Le guide vert, Ile de France, Michelin, mars 2000).

Le voyageur qui  remonterait  la Bièvre vers St Quentin-en -Yvelines sur la route de Jouy,  remarquerait l'acqueduc de Buc , construit en 1684 pour amener aux bassins de Versailles les eaux du plateau de Saclay.


Les étangs du Val et du Moulin-Renard , précise le  guide, ont été aménagés pour la pêche et la voile, des chemins permettent d'en faire le tour (baignade et canotage interdits) 
Entre la Minière et le Buc, l'étang de la Geneste est réservé à la pêche.



Dès le XV ème siècle, les eaux de la Bièvre servirent  à alimenter les manufactures  des tapissiers. 




Preuve en est la  fontaine restaurée 
des Gobelins  au nom prestigieux, sur le plan artistique, et fantastique pour son  l'étymologie.

Les Normands reconnaîtront leurs "Goubelins",  lutins espiègles, parfois méchants, selon les grands-mères qui mettaient en garde leurs petits-enfants contre leur malice .

Ah ! coum' disait ma grand mère
Es servant'  de nous vaîsins,
Qui giblaient  en r'venant d' traire :
Déf'ious , déf'ious des goublins
Qui rôdent l' sai  dans les q'mins,
Déf'ious, déf'ious des goublins
Qui rôdent l' sai dans les q'mins.
Goubelins que les Anglais traduiront par  "goblins"
et les allemands par 'kobold



Le jour de cette promenade, point de goubelins, point de castors, 
mais de gentils lutins dont les petites jambes ont parcouru  vaillamment une bonne douzaine de kilomètres .


Tout est bon pour inciter à la marche, sans rechigner:



chansons traditionnelles, revues et allongées  - combien de km à pied?
Qu'est -ce qui rime avec "souliers" ?
comptines
inventions verbales


 haltes pour admirer les animaux et le paysage








S'amuser à voir des formes animales dans les éléments de la nature. (Ou paréidolie , du grec ancien para , à côté de , et eidolôn, diminutif d'eidos, apparence, forme )

Voyez-vous autre chose qu'un bloc de terre raviné ?


La vallée de la Bièvre recèle également des trésors artistiques et des  souvenirs littéraires.

Le  guide vert nous apprend que le moulin de Vauboyen -datant des 16 ème et 17 ème siècle- fut  acheté par l'éditeur d'art Pierre de Tartas qui le transforma en galerie d'art contemporain et centre artistique.

A Bièvres encore le château des Roches, appartenant à Bertin l'aîné, directeur du Journal des débats, réunit de nombreux artistes et écrivains: Chateaubriand, Ingres, Rossin, Berlioz, et surtout Victor Hugo...
Mais ceci est une autre histoire, et , qui sait ? le sujet d'une autre balade.
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Retour à Saint-Quentin -en-Yvelines avec cette oeuvre bucolique de Denis Mondineu dans le cadre urbain de la rue Le Nôtre:
la pêche au bord de la Bièvre






(A suivre)

vendredi, avril 01, 2016

Ca coule de source (1)





A Guyancourt , dans le quartier de Saint-Quentin  s'impose une  oeuvre monumentale de Marta Pan 
( Budapest 1923-Paris 2008) 

Elle comprend trois parties:
 



-Les engouffrements, bassins vides absorbant l'eau qui s'écoule sous le Boulevard Vauban pour rejoindre un large bassin circulaire




la Perspective, au centre duquel se trouve une structure métallique ondulée, serpent d'eau ou flèche qui oriente notre regard vers 



-les Emmarchements, troisième partie composée de deux anneaux métalliques décalés , sorte de Torii japonais, marquant symboliquement 




l'entrée du parc des sources de la Bièvre, dessiné par le paysagiste Paul Soun et l'architecte Bernard Lemoine en 1975.


Cette visite de la ville moderne de Saint-Quentin -en -Yvelines avait été l'occasion d'une rencontre, très attendue, avec ma copinaute Cergie -qui tire son pseudonyme  du nom de la ville moderne, Cergy-Pontoise


"Villes nouvelles" toutes deux, Saint-Quentin et Cergy -Pontoise présentent des rapprochements quant aux orientations architecturales qui ont présidé à leur conception.

Ainsi le carré urbain (1999), aménagement du parc des sources autour de l'eau, a pour concepteur Dani Karavan, qui est également  dans la ville nouvelle de Cergy, le créateur de , l'axe majeur  ,

" exemple très particulier d’art public à la frontière entre la sculpture, le paysage, l’urbanisme et l’architecture."


Carré virtuel où l'oeil du spectateur doit être créatif.

Le temps clair se prêtait bien à une flânerie amicale, et, bien sûr, à une série de photos, bien que Lucie réduise à présent sa chasse aux clichés.

-"Tiens, s'exclama- t-elle, un groupe d'enfants, qui passe la Porte.  
Ce sera amusant de les prendre .
- Tu aimes intégrer des personnages dans les lieux que tu photographies, ai-je constaté. 
- Question d'échelle, fut sa réponse ."

Simple question d'échelle ? Vraiment ?
ou  point de vue sur la Beauté, s'opposant  à celui de Baudelaire:
"Je hais le mouvement qui déplace les lignes "


-"Ils doivent avoir l'habitude de passer par là", reprit Lucie, commentant la promenade du groupe babillant, pour qui, visiblement, la Porte- et c'est tant mieux- s'inscrivait dans le quotidien, sans la dimension d'un quelconque rite initiatique .

En somme, une oeuvre d'art, intégrée à la vie courante: ça coule de source.
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http://urbamet.documentation.developpement-durable.gouv.fr/documents/Urbamet/0313/Urbamet-0313097/PCAOUV00198719_s5.pdf


Algues et rythmes





Un poisson d'avril
Est venu me raconter
Qu'on lui avait pris
Sa jolie corde à sauter

C'était un cheval
Qui l'emportait sur son coeur
Le long du canal
Où valsaient les remorqueurs

Et alors un serpent
S'est offert comme remplaçant
Le poisson très content
Est parti à travers champs

Il sauta si haut
Qu'il s'est envolé dans l'air
Il sauta si haut
Qu'il est retombé dans l'eau.

Boris VIAN



(Photo réalisée et transmise par une amie qui connaît bien mes petites manies: merci !)



Et une belle création due au talent de:
Ilane de Koppel

Espèce: Livrus recyclus 

La Vie totale- Sur l'île de Groix

     L'association l'écume des films  lance son festival sur le thème des Iles, du 19 au 15 mars. Mardi 19 mars à la médiathèque , ...