Affichage des articles dont le libellé est HSN. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est HSN. Afficher tous les articles

dimanche, septembre 25, 2011

Autour d'Une Histoire sans nom-La Trappe (5/6)


Après le récit de Gilles Bataille, et l'évanouissement de Madame de Ferjol, le père  Augustin, abbé de la Trappe, prit la parole:
Le voleur n'était autre que le frère Riculf, le sombre capucin devenu bandit, son premier forfait ayant été le viol de Lasthénie , au pied du monumental escalier,  suivi du vol de la bague. En pleine crise de somnambulisme, la jeune fille  n'avait  eu aucune conscience des faits.


Plus tard, saisi  par le repentir, Riculf demanda asile à la Trappe, seul refuge pour ceux que n'avait pas condamnés  la justice humaine.
Or, celui-ci venait de mourir  -et d'être  enterré selon le rite des trappistes, sans cercueil , à même la terre, le visage devant être recouvert jour après jour  par les pelletées de terre des autres moines. 


A ce stade de la visite, La présidente de la société Barbey a demandé au frère Gérard  et au père abbé quelle était la part de vérité ou de fiction  dans le rite décrit par l'écrivain, et dans les "dieries" populaires relatives à la vie des trappistes  .
-Non, les moines ne creusent pas leur tombe jour après jour.
-Non, ils  ne se croisent pas en murmurant:"Frère , il faut mourir"

-Oui, Ils sont bien inhumés à même la terre,le visage découvert , mais la fosse est comblée lentement, au cours de l'inhumation, et non jour après jour .
................................................................................................................................................................

En entendant les explications du père abbé, Madame de Ferjol éprouve à la fois une intense culpabilité, se remémorant les  souffrances  injustes infligées par elle à sa fille, et une haine violente contre Riculf.
Un jour de foire, à l'insu de sa servante, elle se rend à la Trappe.

"Elle trouva sans peine la fosse qu’elle cherchait. Le cimetière
était désert, et la fosse du dernier trappiste décédé, creusée dans
les hautes herbes, était bien la fosse de Riculf. Elle s’en approcha
jusqu’au bord et regarda dedans avec ces yeux que la haine a
comme l’amour, — ces yeux qui dévorent tout, — et elle vit le
mort  dans  le  fond  de  sa  fosse. Malgré les pelletées de terre
éparpillées autour du visage, et dont le plus grand nombre avait
porté sur la partie inférieure du cadavre, on voyait encore la face
d’un homme. Ah! elle le reconnut, malgré cette barbe qui avait
blanchi, et ces yeux sans regard que les vers rongeaient déjà dans
leurs orbites. Elle enviait le sort de ces vers… Elle aurait voulu
être un de ces vers…" 



 Son  ombre  agrandie parle soleil couchant d'une soirée d'été vampirise  la tombe de Riculf.
Le père Augustin , qui l'a suivie, tente de la ramener à des sentiments plus chrétiens -elle qui avait déclaré, en apprenant que l'expiation de Riculf lui vaudrait peut-être le salut- et le visage d'un bienheureux :
"S'il est au ciel, je n'en voudrais pas avec lui!"
La voix du  narrateur conclut cette histoire en jugeant son personnage :

"— Oh! Madame, — dit le prêtre, — vous êtes une chrétienne,
et ce que vous dites n’est pas chrétien. Venir regarder le mort
dans sa tombe avec les yeux de la haine, c’est le profaner, et on
doit le respect aux morts.
— À celui-là, jamais! — fit-elle. — J’avais tout à l’heure envie
de descendre dans sa tombe pour le fouler sous mes talons!
— Pauvre femme! — dit le prêtre; — elle mourra dans
l’impénitence finale de sentiments trop absolus pour la vie. »
Et, en effet, elle mourut à quelque temps de là, dans cette
impénitence sublime que le monde peut admirer, mais nous,
non!"
 ....................................................................................................................................................
(Lien : texte intégral  d'une Histoire sans Nom)  
et celui du roman gothique qui a inspiré  Barbey: le Moine de M. G. Lewis
...............................................................................................................................................................;


.................................................................................................................................................................
Le frère Gérard, archiviste à la Trappe et chargé de l'hôtellerie a accueilli notre  groupe de manière très affable , nous a fait  visiter le cimetière où reposent les frères trappistes, puis, dans l'église cistercienne de Notre-Dame de Grâce a évoqué son histoire , le mode de vie des moines  ponctué par les offices ,et nous  a recommandé la boutique et ses produits .
.................................................................................................................................................................


........................................................................................................................................................

Articles précédents: ici:4/6
    là:2/6
et aussi
...................................................................................................................................................................

jeudi, septembre 22, 2011

Vers le dénouement d'une histoire sans nom (4/6)


...................................................................................................................................................................
 Vingt-cinq ans plus tard,ce portail franchi, le mystère fut  éclairci, par hasard.
...............................................................................................................................................................



(photo: (Le Connétable des Lettres , N 10 , juillet 2011, bulletin de la société Barbey d'Aurevilly)
..............................................................................................................................................................
Après la mort de Lasthénie, Madame de Ferjol  reste  comme recluse à Olonde, jusqu'au jour où elle accepte l'invitation du comte du Lude, à Aureville, près de Saint-Sauveur -le -Vicomte.
 Cette petite ville, moins sélective que l'aristocratique Valognes admet une société plus mêlée, aussi voisinent dans la vaste salle à manger de  leur hôte, des aristocrates , le père abbé de la Trappe, et un épicier enrichi  sous l'Empire, Gilles Bataille.Celui -ci porte une bague qui attire l'attention, et dont il conte l'histoire:




Une nuit, alerté par des bruits indiquant qu'on tentait  de le cambrioler, il descend et  voit une main essayant de s'introduire pour forcer le passage. Avec son commis, Gilles Bataille cadenasse cette  main pour récupérer au petit matin son voleur. Horreur! ce dernier , pour s'évader s'est mutilé lui-même , et seule la main subsiste, avec au doigt , une bague que garde l'épicier  comme butin.
Lorsqu'il la fait circuler parmi les convives, Madame de Ferjol y jette un regard indifférent,voire hautain , puis pousse un cri et s'évanouit : elle a  reconnu l'émeraude de son époux , transmise par elle  à Lasthénie, et disparue - juste après le départ précipité du sombre capucin- signe , pour la mère de la culpabilité de sa fille qui aurait , selon elle, donné la bague à son séducteur .


(Gravure de Gilbert Bazard, illustrant l'essai de Dominique Bussillet, Barbey d'aurevilly, Une nature ardente, Cahiers du temps, P.12)

.................................................................................................................................................................
Alors, le père abbé de l'abbaye cistercienne de la  Trappe  de Bricquebec prit  la parole...................
..............................................................................................................................................................

(A suivre ,
+  la suite de la visite  du groupe de la société Barbey d'Aurevilly à  la Trappe de Bricquebec )
..................................................................................................................................................................




lundi, septembre 19, 2011

Journée aurevillienne: autour d'Une histoire sans nom (2/6)

Bricquebec, 3 septembre 2011



Lien ici :mail art /lectures artistiques



 Après le mot d'accueil de  la Présidente de la société Barbey d'Aurevilly, Madame Isabelle Barré, la lecture et l'approbation  du rapport moral et du rapport financier, le lieu de la prochaine sortie aurevillienne a été choisi : ce sera le Château de Tourlaville, théâtre des amours incestueuses de Julien  et Marguerite de Ravalet, tragiques personnages d'Une page d'Histoire .


 Puis Patrick Avrane, essayiste  et psychanalyste a présenté Une Histoire sans nom à la lumière de la psychanalyse freudienne.
La première partie de ce roman  se situe dans une ville encaissée du Forez,semblable à   Bourg -Argental où   Barbey d'Aurevilly, âgé de 38 ans  en 1846, résida, y connut une crise dont il sortit guéri  et retrouva la foi.



Au fond de cet abîme vivent, avec leur servante, deux femmes, les "dames du pays", Madame de Ferjol, originaire du Cotentin , veuve d'un époux adoré et sa fille, de seize ans, Lasthénie. Les deux noms choisis annoncent les thèmes: Madame de Fergeol  condamnera sa fille à une geôle de fer, et  Lasthénie, mourra... d'asthénie et donnera  son nom à un syndrome psychopathologique , celui d'une anémie incompréhensible pour l'entourage et les médecins puisque le/ la malade se ponctionne dans le secret des quantités de sang qui le / la conduisent à la mort.
Fort pieuses, les deux dames reçoivent   pour le carême, un  capucin  prédicateur , le frère Riculf , qui loge un soir chez elle et disparaît le lendemain  inexplicablement , sans avoir terminé à l'église son cycle de prêches .  Or, à un "e" près, le nom du prédicateur est l'anagramme de ...Lucifer.
Peu de temps après, Lasthénie tombe dans une maladie de langueur inexplicable, et sa mère, l'observant la nuit , comprend qu'elle est enceinte : "Elle a le masque!"s'exclame-elle.
Qui est responsable de son état, de sa souillure ?

Aux questions répétées de sa mère , Lasthénie ne peut répondre, nie, dément, clame son innocence, même les signes de sa grossesse devenus évidents, et malgré la confession que lui fait sa mère pour lui faire avouer son secret elle-même s'était donnée en dehors du mariage à Monsieur de Ferjol, qui l'avait enlevée, et Lasthénie est le fruit de ces amours coupables , coupable elle-même , dans une conception janséniste ( et maistrienne), les fautes des parents devant retomber sur leur progéniture .
Pour cacher l'état de sa fille , Madame de Ferjol retourne sur ses terres, au château d'Olonde, et c'est là que recluse, persécutée , enfermée dans le mutisme,  Lasthénie donnera naissance à un enfant mort-né , puis mourra elle-même, dans sa position habituelle, la tête contre la muraille.
Madame de Ferjol découvre alors des traces de sang sous le sein de sa fille, et dégrafant son corsage  trouve dix-huit épingles plantées dans la région du coeur .

Ce n'est que 25 as plus tard , que l''explication sera donnée, explication que  Madame de Ferjol au fond d'elle -même  avait toujours sue quand "la pensée lui revenait de cet effrayant capucin qui lui fascinait la pensée (sic)et dont elle n'aurait pas osé prononcer le nom (=LUCIFER) Assembler les lettres de ce nom et le prononcer tout bas  lui paraissait un monstrueux sacrilège."
Victime de crises de somnanbulisme, Lasthénie  avait été violée par le frère Riculf, la confession- le destin de celui -ci ayant servi de  fil conducteur pour la suite de cette journée. (A suivre )
.......................................................................................................................................................
Dans une optique psychanalytique (et non plus dans une interprétation janséniste), que nous dit Barbey, à travers cette  sombre histoire- lui qui a souffert de la froideur de sa mère  ?

Il nous parle du secret maternel , et du rapport dénaturé que la mère entretient avec sa fille:"Sa mère l'adorait, mais surtout parce qu'elle ressemblait à l'homme qu'elle avait aimé avec un si grand entraînement . Elle jouissait de sa fille en silence. elle s'en repaissait sans rien dire ."*
Un commentaire du narrateur-auteur, juste avant que Madame de Ferjol comprenne l'état de sa fille assimile la mère possessive à une monstrueuse araignée. Paradoxalement le viol est le moyen ultime de faire exister le corps nié , le corps vide de Lasthénie , vide parce qu' "il représente le corps de son père mort"*
De plus, elle se refuse à reconnaître et à nommer  comme coupable un homme de Dieu, et comme  pour elle, le dieu qu'elle adore est l'époux disparu, le conflit psychologique   est insoluble , la punition inévitable .

Une comparaison  a été faite par le conférencier avec la nouvelle  de Kleist, la Marquise d'O (1810) , -nouvelle  sûrement connue de  Barbey-
Même situation , déjà présente chez Montaigne  (une jeune femme se retrouve enceinte à son insu) mais un traitement différent puisque la Marquise au lieu de  cacher son état fait savoir par voie de presse qu'elle demande au père de son enfant de se faire connaître afin qu'elle l'épouse.
  Au dénouement,   grande sera sa surprise en  reconnaissant  le bel officier qui l'avait protégée d'un viol lors de la mise à sac du château et qu'elle n'aurait jamais imaginé  être un "démon "tant  l'avait vu comme" un ange".
Le texte de Kleist, très beau dans sa  concision, peut être interprété, dans certains passages , selon Patrick Avrane,  comme un désir  incestueux de la jeune femme envers son père.Cependant, sur le plan psychanalytique, il n'atteint pas la richesse de celui du Barbey qui a donné son nom au syndrome de Lasthénie de Ferjol,étudié cliniquement par le professeur Jean Bernard, célèbre hématologue: ce n'est pas le moindre paradoxe de cette "histoire sans nom"





*In Sigila revue transdiscimplinaire franco-portugaise 
Numéro 14 La Honte-a vergonha, P 40 , article de Patrick Avrane: Une histoire sans nom, le secret d'une honte 

(Article personnel précédent sur Une Histoire sans nom -le Château d'Ollonde: ici
et
sur la Marquise d'O , au théâtre Gérard Philippe à Saint-Denis, )

dimanche, décembre 16, 2007

La Marquise d'O, d'après Kleist, mise en scène de Lukas Hemleb

(Cf Article personnel sur le même thème, traité par Barbey d'Aurevilly, dans Une Histoire sans nom   Ici )
.........................................................................................................................................................

Décor, costumes et lumières s'inspirent, me semble-t-il, de l'univers du peintre Gaspar David Friedrich (1774-1840)
1-Eglise dans un paysage d'hiver (1811)
2-Falaises de craie sur l'île de Rügen (1848)
3-Abbaye dans la forêt de chênes
Un panneau coulissant mobile agrandit ou resserre à volonté l'espace scénique : de loin, dans le flou artistique d'un jeu d'ombres chinoises, le spectateur assiste à la mise à sac de la forteresse , voit errer la Marquise , écoute les potins de salon ou subit, comme l'héroïne une sensation d'écrasement .(Voir photo)
Au sol, un dallage noir et blanc évoque un échiquier où les pièces seraient déplacées par chacun des personnages en quête d'honneur dans ce jeu de la vérité .
















Avec Lucas Anglarès ( le frère),Francine Bergé (la mère),Simon Eine (le père), Cécile Garcia-Fogel (La marquise d'O), Brontis Jodorowsky(le Comte F) et Stéphanos Thomopoulos, le pianiste


production
 maison de la culture d'Amiens avec le soutien du théâtre Gérard Philipe de Saint- Denis

"A M...,ville importante de haute-Italie, la marquise d'O, dame d'excellente réputation, veuve et mère de plusieurs enfants, fit savoir par la presse qu'elle était , sans savoir comment, dans l'attente d'un heureux événement , que le père de l'enfant qu'elle attendait devait se faire connaître , et que, pour des considérations d'ordre familial, elle était prête à l'épouser ..."

Editions Mille et Une nuits .......................................................................................................................
......................................................................................


La sonate opus 111 de Beethoven jouée au piano ponctue cette adaptation théatrale qui oscille entre (mélo) drame et comédie, ces nuances donnent à la nouvelle beaucoup de densité .
Le tour de force de Lukas Hemleb est d'avoir restitué tel quel le texte d'Henrich von Kleist sans l'avoir réécrit , redécoupé pour le théâtre sous la forme canonique dialogues/didascalies .

Les longues phrases complexes distribuent à tour de rôle la parole
:tel personnage , d'abord narrateur-témoin devient acteur et vice -versa, d'où un effet de distanciation , particulièrement
pertinent pour le personnage de la Marquise observatrice effarée de son étrange état.

D'abord décontenancé par ce procédé inhabituel, le spectateur est vite conquis par la précision du jeu des acteurs, le subtil mélange du tragique et du comique, le charme du décor.
Eblouissant!



dimanche, septembre 23, 2007

Le château d'Ollonde, cadre d'une Histoire sans nom

Le château d'Ollonde, commune de Canville -La Rocque
Propriétaire actuel: le marquis d'Harcourt

"Ni diabolique, ni céleste, mais...sans nom "
1882- Une Histoire sans nom
L'intrigue de ce roman se déroule en deux parties inégales et en deux lieux bien distincts :

Chapitre I à VII, dans une petite bourgade du Forez" dont les montagnes dessinaient un cône renversé ", à l'hôtel de la baronne de Ferjol, "une fille de race normande qu'un mariage, qui avait été une folie d'inclination avait jetée dans ce trou de formica-leo (Ne peut-on entendre Forniqua ?) comme elle disait dédaigneusement en pensant aux horizons et aux luxuriants (luxurieux? ) paysages de son opulent pays ..."

Après avoir hébergé, à l'ouverture du carême un capucin, brillant prédicateur , le Père Riculf, mystérieusement disparu au matin , Mme de Ferjol, qui vit isolée dans la seule compagnie de sa servante Agathe et de sa fille Lasthénie se rend compte, progressivement que l'état de langueur de cette dernière est imputable à une grossesse , inexplicable pour la jeune fille qui ne peut opposer aux questions pressantes de sa mère que des protestations d'innocence, puis un mutisme bientôt proche de" l'idiotisme".Chapitre VIII à XIII . C'est au château d'Olonde que l'austère, la janséniste MMe de Ferjol compte cacher aux yeux du monde cette grossesse déshonorante, "son vieux château d'Olonde, situé dans un coin de pays perdu qui est entre la côte de la Manche et une des extrémités de la presqu'île du Cotentin . Il n'y avait pas alors de grande route tracée allant de ce côté. Le château était gardé par de mauvais chemins de traverse , aux ornières profondes , et aussi, une partie de l'année, par ces vents de sud-ouest qui y soufflent la pluie, comme s'il avait été" bâti en ces chemins perdus, par quelque misanthrope ou quelque avare qui aurait voulu qu'on n'y vint jamais "

Suit un voyage éprouvant, dans une voiture semblable à" un cercueil", au terme duquel le château , comme le silence, enferme les deux femmes dans "la même bière". Ces macabres métaphores sont reprises dans une scène cauchemardesque : Agathe, en pèlerinage au tombeau du Bienheureux Thomas Hélie voit sa route barrée par un cercueil ! Intersigne annonçant le sort de Lasthénie: celle-ci accouche d'un enfant mort-né- que Mme de Ferjol ensevelit dans le jardin- puis finit par succomber,"emportant dans la tombe le secret de sa vie, que Madame de Ferjol croyait son secret "Découvrant du sang sous le sein de la malheureuse, La mère et la servante "ouvrirent le corsage. L'horreur les prit. Lasthénie s'était tuée- lentement tuée- en détail , et en combien de temps ?tous les jours un peu plus, avec des épingles . Elles en enlevèrent dix-huit, fichées dans la région du coeur ."Ce "retour au pays natal" ,voulu par Madame de Ferjol pour cacher "la faute" de sa fille , correspond au "retour du refoulé" puisque se dévoile la propre" faute" de la mère, enceinte - de Lasthénie"- après avoir été enlevée par l'officier qui l'épousera ensuite .



"Elles arrivèrent enfin à Olonde (...) Cette gaieté brillante d'un beau jour d'hiver ( on était en janvier ) comme elle n'en avait jamais vu un seul , même au printemps , dans cette cave des montagnes du Forez où une rare lumière tombait d'en haut comme d'un soupirail, aurait inondé délicieusement son âme, si elle avait eu de l'âme encore, mais elle n'en avait pas assez pour éprouver le bien de cette soudaine douche de lumière. Le soleil clair de ce jour-là, sorti d'une de ces neuvaines de pluie, comme on dit en ces parages de l'ouest, où elles sont si fréquentes, faisait resplendir les masses de ces campagnes, vetres parfois jusqu'en hiver" (...) Folio, p.109


"Malgré les trois personnes qui y étaient revenues, l'aspect extérieur du château ne changea pas . Il semblait toujours qu'il n'y avait plus là âme qui vive pour les paysans qui passaient au pied , et qui n'y faisaient pas plus attention que s'il n'avait jamais existé ."
ils l'avaient toujours vu à la même place , ayant, sous ses contrevents et ses obliques condamnés, la même physionmie d'excommunié, comme ils disaient, expression religieuse des temps antérieurs, profonde et sinistre; et l'habitude de le voir les avait blasés sur cette chose singulière d'un château frappé d'un abandon qui ressemblait à la mort " (Folio, p. 111)


L'énigme est résolue aux chapitres XII et XIII un quart de siècle après ce drame : "Lasthénie était somnambule , comme Lady Macbeth "(...) et c'est dans un de ces accès de somnabulisme que le Père Riculf l'avait surprise, une nuit, sortie de sa chambre et assise dans le grand escalier, endormie là, (...) et que, tenté par le démon des nuits solitaires , il avait accompli sur elle ce crime dont la malheureuse enfant n'avait pas eu conscience dans l'ignorance de son sommeil"

Notons que la médecine reconnaît le syndrome de Lasthénie, en référence au roman deBarbey.

Avant ce dénouement contenant une double révélation, celle Gilles Bataille- ancien épicier de Napoléon- puis celle du Révérend Père abbé de La Trappe de Bricquebec, le narrateur avait multiplié les indices accusant Le Père Riculf .
Aussi amusant que juste est ce commentaire de Monique Nemer ( in les Annales de Normandie, numéro spécial 2585, 4ème trimestre 1984) : dans Une histoire sans nom , aux deux questions portant sur la paternité de l'enfant de Lasthénie et sur la paternité littéraire du roman de Barbey, on peut donner la même réponse: le moine (Riculf et le roman homonyme de M. G. Lewis, chef- d'oeuvre de la littérature fantastique "frénétique")

Inhabituel par rapport aux procédés narratifs de Barbey- pas de récits emboités pour amorcer l'intrigue , pas de narrateur -témoin assimilable à l'auteur - ce roman contient cependant des allusions d'ordre personnel et familial, mise en exergue par M. Jacques Petit:

La petite ville "au pied des Cévennes" (Ses veines ? ) est un souvenir du séjour que fit Barbey à Bourg -Argntal en 1846, le jansénisme farouche de Mme de Ferjol rappelle l'atmosphère familiale :" Une éducation compressive avait pesé sur moi sans me briser" , le personnage , l'enlèvement d'une certaine Jacqueline d'Olonde alimenta la chronique de Saint -Sauveur- le - Vicomte, le personnage déconsidéré de Bataille évoque l'ostracisme de la société Valognaise et par -dessus tout , le fantasme du sang reprend l''épisode ( ressassé , romancé?) du cordon ombilical mal noué d'où s'échappait la vie de Jules- Amédée, né le jour des morts .




"

Home, sweet home

Au musée de Vire, une exposition très intéressante " invite à s'interroger sur la séparation des sphères privées et publiques, du...